[Revue roman] Phobos • Victor Dixen

Publié le par Ahrell

Comme ça faisait longtemps que je n'avais pas lu un livre en français d'un auteur français, on va dire que Phobos est pile bien tombé pour que je me remette dedans. J'étais tombée sur ce titre totalement par hasard, et malgré le fait que le résumé me paraissait un peu .. gros, le nombre de critiques positives a fini par me convaincre de le lire. Alors, la critique en bref :

Première parution : 11 juin 2015 • De Victor Dixen • Ma note globale : ★★★★☆

J'ai lu l'édition R Jeunesse (Robert Laffont)

Vivre sur une autre planète, c'est le rêve de beaucoup de gens. Mais grâce au programme Génésis, ce rêve va devenir la réalité de douze jeunes personnes, six garçons et six filles. Entraînés pendant un an à survivre en apesanteur, à piloter un vaisseau spatial, ou à administrer des soins lorsqu'ils seront loin de tout, douze jeunes hommes et femmes ont été sélectionnés pour vivre une aventure incroyable : prendre un aller simple pour Mars, avec pour but de poser la première colonie humaine sur la planète rouge.

Cette réalité, c'est maintenant celle de Léonor, jeune française de 18 ans à qui la vie n'a pas fait de cadeaux. Orpheline jetée littéralement à la poubelle lorsqu'elle avait trois ans, elle a jusque là passé sa vie seule, à faire ce qu'il fallait pour survivre dans la jungle impitoyable de la vie. Mettre en boîtes de la pâtée pour chiens n'étant pas le rêve ultime de la jeune femme, en entendant parler du programme de Génésis, elle n'a pas hésité à candidater - même en se disant qu'elle ne serait jamais sélectionnée, elle qui n'avait ni compétences particulières ni famille pour la soutenir.

Et pourtant, la voilà dans sa combinaison d'astronaute, sur le point de partir vers Mars, vers son avenir. Mais la fusée à bord de laquelle elle va monter n'est pas n'importe quelle fusée : le Cupido, c'est aussi le vaisseau spatial qui va abriter la plus incroyable des télé-réalités jamais enregistrées. Le principe est simple : pendant les cinq mois de voyage vers Mars, les garçons et les filles vivront séparément, avec pour seule opportunité de se rencontrer des séances quotidiennes de speed-dating ... de six minutes. Six minutes pour se rencontrer, se plaire, et parvenir à trouver l'amour de sa vie. Car lorsque le Cupido se posera sur Mars, ce seront six couples officiellement mariés qui fouleront la planète rouge de leurs pieds, et non plus douze jeunes gens.

Télé-réalité, voyage spatial, secrets à cacher, colonisation : voilà l'alléchant programme de Léonor pour le reste de sa vie.

Alors, très honnêtement, j'ai commencé la lecture en me disant que la trame avait l'air tellement énorme que je n'allais pas réussir à le lire en entier sans lever les yeux au ciel une fois par page. Finalement, j'ai quand même lu le livre en quatre jours, donc il n'était pas si mal, et je vais même lire la suite - forcément - mais j'ai quand même quelques petits trucs qui m'ont dérangée. Décortiquons tout cela.

Je vais commencer par la narration, parce que celle dans Phobos est à la fois plutôt sympa dans la construction, mais j'ai quand même eu du mal. Etant donné que le principe du livre repose sur une télé-réalité, la narration est construite en champs qui correspondent au point de vue personnel de Léonor, à la première personne donc, en contre-champs - ce qui se passe derrière la caméra avec l'équipe de "gestion" de l'émission - et en hors-champs qui sont des séquences totalement détachées du vaisseau et de ceux qui travaillent sur l'émission. Sur le papier, c'est super sympa, l'alternance des points de vue, et on comprend qu'au bout d'un moment, Léonor étant limitée à son petit vaisseau spatial, ça aurait été un peu rébarbatif de rester dans sa focalisation. Et puis vu ce qui se passe en contre-champ, ça aurait été difficile de mettre en place l'intrigue (parce qu'évidemment que le livre ne se cantonne pas à une retranscription de télé-réalité) sans alterne les focalisations. Donc ça, c'était vraiment pas mal, et j'aime bien le principe d'avoir différencié ces narrations avec les termes techniques de l'audiovisuel.

Le seul bémol que je mettrais à cette narration, c'est qu'au bout d'un moment je ne lisais plus ces inter-titres disons, mais du coup je devais souvent y revenir car la date est indiquée, et qu'il y avait des fois des énormes ellipses. Donc des fois, je me retrouvais à lire des choses comme "cela fait cinq semaines que nous sommes dans le Cupido" (j'invente hein) alors que le paragraphe d'avant, ça faisait seulement six jours. Après, c'est de ma faute pour ne pas lire les changements de "chapitres", peut-être que ça n'a jamais dérangé personne d'autre, mais bon. Ces ellipses, je les comprends quand même parce que ça aurait été teeeeeellement rébarbatif de retranscrire vraiment toutes les journées. Donc c'est normal, c'est juste que le changement de rythme est parfois un peu surprenant.

Et puis au bout d'un moment, on en aurait sûrement marre d'avoir les états d'âme de Léonor. Elle est construite comme un personnage abîmé par la vie (comme tous ceux du Cupido) alors qu'au fond c'est une jeune fille au coeur pur, tout ça tout ça. Mais des fois, elle m'a tapé sur le système. Je crois que j'ai assez peu de tolérance envers les personnages principaux finalement, mais Léonor est l'archétype du personnage qui en a tellement chié dans la vie que le lecteur doit ressentir de la compassion pour elle. Abandonnée enfant, pas d'amis ni de famille, un job pourri MAIS c'est une battante, elle est magnifique (n'oublions pas ses cheveux roux qui nous sont rappelés toutes les pages), super douée en dessins, en même temps elle est d'une naïveté extrême alors qu'elle nous dit "j'ai toujours vécu seule, je ne fais confiance qu'à moi-même" ... Encore une fois, c'est un livre adressés aux adolescents, qui ont peut-être moins de recul, mais des fois, j'avais vraiment envie de la secouer en lui disant "arrête tes conneries deux minutes" (surtout à la fin. mon dieu à la fin.)

Après, je la présente comme ceci, mais elle est supportable quand même la plupart du temps, et puis après tout, c'est une héroïne : elle porte la charge de faire avancer l'intrigue, donc forcément qu'il y a des éléments gros comme une maison qui vont lui tomber dessus. Mais ces éléments gros comme une maison, j'ai beau savoir que je lisais de la science-fiction, il y a des moments où je me disais que c'était vraiment trop, trop, trop. La fille qui commence l'aventure en jean troué, en bas des sondages, et qui finit en robe de créateur avec tout le monde (tout le monde) qui bave en la regardant, les personnages qui sont présentés comme la gentillesse incarnée à la limite de la niaiserie, une émission de TV qui réunit CINQ MILLIARDS de téléspectateurs ... okay, le dernier, c'est un détail presque infime, mais juste pour dire que des fois, c'était trop.

Alors avec tout ça, comment j'ai pu mettre quatre étoiles quand même ? Déjà, je trouve les personnages intéressants. Ils sont souvent assez stéréotypés, mais ils ont quand même l'air humain, il y en a qui sont forts, d'autres faibles, ils se laissent envahir par la peur, l'espoir - surtout l'espoir, parce que tous les candidats du Cupido sont des ""rebuts"" qui voient en Mars une nouvelle chance qui leur est adressée. Et du coup, c'est assez difficile de ne pas s'attacher un minimum à eux - tout du moins à ceux que l'on voit assez pour apprendre à les connaître. Et puis, c'est un petit détail, mais je trouve ça cool que les douze candidats viennent du monde entier : ça ne sert pas grand chose à l'intrigue, mais ça apporte un peu de diversité bienvenue quand il aurait presque été aussi simple de tous les faire venir du même pays.

Ensuite, je ne vais pas vous mentir, l'intrigue est vraiment prenante. Enfin pas nécessairement l'intrigue qui apporte l'élément déclencheur que l'on voit arriver très, très tôt, mais plutôt le suspens. Il y a beaucoup de choses qui sont encore entourées de mystères à la fin de ce premier tome, et même tout au long du livre. Du coup, il est vraiment très facile à lire, et je pense que Dixen marque beaucoup de points sur ce suspens qu'il entretient. Au début, les questions que l'on se pose sont assez triviales : qui sont les candidats, car comme on est focalisés sur Léonor, les garçons du Cupido sont inconnus ; qui va finir avec qui ; pourquoi Léonor a été abandonnée, toutes ces questions laissent au fur et à mesure place à des enjeux somme toute BEAUCOUP plus importants, mais que je ne vais pas révéler là pour préserver le suspens.

Pour finir, je dirai que même si j'ai insisté sur les points négatifs, très franchement, Phobos est une bonne lecture : littérairement parlant, ce n'est pas une révolution, mais l'histoire est franchement sympathique à suivre, et une fois commencé, c'est assez difficile de reposer le livre sans savoir ce qui se passer.

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J
C'est vrai que l'univers et le contexte ont l'air constauds! Mais ça veut dire que les livres vont être riches en contenu, et ça c'est un truc que j'apprécie! :D<br /> <br /> Par contre le truc d'une télé-réalité sous forme de speed dating...ça casse un peu tout dit comme ça lol<br /> <br /> Après je dirais que les défauts sont supportables s'ils sont bien présentés :)
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A
franchement oui, en lisant le résumé on se dit "euh ouais, il manque plus que l'arrivée des martiens et on est bons là !" mais du coup c'est vrai que d'un côté, c'est assez intéressant parce qu'il y a forcément matière à parler, même si du coup le principe reste quand même un peu too much :) eh oui, le côté télé-réalité c'est assez space mais je suppose que c'était en partie pour dénoncer l'absurdité du concept-même et pour justifier le fait qu'on voit ce qui se passe sur Terre et dans l'espace. franchement, le livre est pas mal, il y a quand même de vrais enjeux dedans il est sympa !